la Parenthèse Enchantée

 

 

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle

Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis ;

Et que l’horizon embrassant tout le cercle

Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

          

Quand est changée en un cachot humide,

Où l’espérance, comme une chauve-souris,

S’en va battant les murs de son aile timide

Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

 

Quand la pluie étalant ses immenses traînées

D’une vaste prison imite les barreaux,

Et qu’un peuple muet infâmes araignées

Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

 

Des cloches tout à coup sautent de furie

Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,

Ainsi que des esprits errants et sans patrie

Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

 

Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,

Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir,

Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,

Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

Poème de Baudelaire

Ven 8 aoû 2008 Aucun commentaire